W6N – 002 – Ian Fleming : Le papa de James Bond
W6N poursuit son petit bonhomme chemin à travers l’histoire de James Bond 007 et dans cet épisode on s’intéresse à l’homme qui créa l’espion le moins secret de sa Majesté : Ian Fleming.
Dix-sept février 1952, Ian Fleming profite de ses trois mois de congés annuels négocié avec son employeur dans sa villa GoldenEye en Jamaïque.
L’ancien agent des services du renseignement naval est installé à son bureau devant sa machine à écrire, cigarette aux lèvres, et commence à taper les premières phrases de son roman Casino Royale qui mettra en scène un futur personnage qui marquera la culture pop : James Bond.
Ses doigts se baladent sur les touches de sa machine à écrire alors qu’il couche les mots sur le papier.
“ L’odeur de fumée et de sueur devient nauséabonde avec un arrière goût d’acide à trois heures du matin. ”
Pas mal mais pas satisfaisant. Fleming essaye encore.
“ Les odeurs de fumée et de sueur peuvent soudainement se mélanger et devenir nauséabondes avec un relent d’acide à trois heures du matin. ”
Pas vraiment mieux…
“ L’odeur d’un casino, mélange de fumée et de sueur, devient nauséabonde à trois heures du matin. ”
Cette fois c’est la bonne pensa Fleming…et de poursuivre
“ L’usure nerveuse causée par le jeu – complexe de rapacité, de peur et de tension – devient insuportable ; les gens se réveillent et se révoltent.
James Bond s’aperçut soudain qu’il était fatigué… Il savait toujours quand son corps ou son esprit en avait assez et…”
Né le 28 mai 1908 à Londres, Ian Lancaster Fleming est issu de la haute société anglaise. Si bien qu’à la mort de son père lors de la grande guerre de 14 18, Winston Churchill lui-même rédigera l’éloge funèbre.
Etudiants, lui et son frère, Peter, seront envoyé au collège Eton. C’est là que Ian apprendra le français, l’allemand et le russe. Des compétences qui lui seront bien utiles des années plus tard même s’il se montre alors plus intéressé par les activités sportives.
Plus ou moins poussé vers à la sortie à cause de son comportement innaproprié, nottament avec les jeunes femmes, il intègrera une académie militaire dans laquelle il ne se sentira jamais vraiment à sa place. Il n’y restera d’ailleurs pas bien longtemps et sera envoyé à la villa Tennerhof à Kitzbühel dans les Alpes autrichienne.
L’établissement, tenu par un couple d’anglais, un ancien diplomate lié aux services secrets britanniques, et une romancière, accueillait alors des adolescents turbulents. C’est dans cet environnement que Ian écrira ses premières histoires et s’addonera au ski ainsi qu’à l’escalade. Il terminera son éducation au sein des Universités de Munich et de Geneve où il rencontrera Monique Panchaud de Bottens avec qui il se fiancera en 1931 mais sans jamais convoler en justes noces.
Grâce aux relations de sa mère il décroche un job chez Reuters ce qui lui vaudra d’être envoyé comme correspondant à Moscou. De retour en Europe en 1933 il travaille quelques temps dans la finance mais sans être particulièrement doué. C’est à cette époque qu’il rencontre Muriel Wright sur les pistes de ski de Kitzbühel. Ils entretiendront une longue relation jusqu’à la mort de celle-ci en 1944 sous le feu des bombes allemandes. Muriel inspirerait quelques années plus tard les femmes qui croiseront la route de 007.
Pourtant dés 1939 Fleming a une aventure avec Ann Charteris, mariéé au Baron O’Neill et qui entretient elle-même une relation extra-conjugale avec Esmond Harmsworth. Après la guerre elle épousera le viconte Rothermere tout en continuant à fréquenter Fleming qu’elle finira par épouser en 1948 ce qui ne les empêchera pas de papilloner chacun de leur côté.
Mais quittons la rubrique des potins des tabloïds pour revenir en 1939 quand Ian Fleming fait une autre rencontre marquante : L’amiral John Godfrey, directeur du British Department of Royal Intelligence pour qui il officiera en tant qu’aide de camp durant six ans. Il sera également enrôlé dans la Royal Navy comme réserviste d’abord au grade de Lieutenant puis de Commandant quelques mois plus tard.
Godfrey était un homme au charactère fort, qui inspirera quelques années plus tard le personnage de M, et Fleming excellait dans son rôle d’agent de liaison entre lui et les autres départements.
Durant la guerre Il tentera de mettre sur pied un plan pour mettre la main sur la machine Enigma qui permettait aux troupes d’Adolf Hitler de communiquer en language codé. Mission qui ne verra jamais le jour mais ce sont bien les Anglais qui décrypteront Enigma grâce notament au mathématicien Alan Turing.
Ensuite entre 41 et 43 il sera chargé de l’opération GoldenEye dont l’objectif était de permettre à l’Angletterre et aux Alliés de conserver le contrôle stratégique du détroit de Gibraltar particulièrement en cas d’alliance entre le régime de Franco et celui du 3ème Reich.
S’il n’a jamais été un agent de terrain, Fleming a mis sur pied la 3Oème unité d’assault qui avait pour mission de voler des documents nazis en amont d’opérations spéciales. Il faisait ainsi partie du commité qui décidait des missions et des cibles. Idem au sein de la T-Force qui devait sécuriser la technologie industrielle allemande avant qu’elles ne soient détruite par les forces nazies qui battaient en retraite durant la fin de la guerre.
Démobilisé en mai 1945 il devient correspondant étranger pour les journaux du groupe Kemsley, qui possédait, entre autre le Sunday Times. Il négocie alors trois mois de congés annuel qu’il passera systématiquement en Jamaïque pays dont il était tombé amoureux lors d’un séjour effectué en 1942 dans le cadre de son engagement dans la T-Force.
C’est donc en février 1952 alors que sa femme Ann était enceinte de leur fils Caspar, que Fleming commença le premier des 12 romans de James Bond, selon une routine immunable : Trois heures ou 2000 mots tôt le matin avant d’aller profiter de la plage et de s’addonner à la plongée sous-marine.
Au début l’enthousiasme autour du roman Casino Royale est plus que mitigé si bien que sans le concours de Peter qui était publié par la maison d’édition Jonathan Cape, le livre aurait été remisé au fond d’un tiroir. Pourtant une fois sorti des presses le roman connaîtra un certains succès à la fois critique et publique, sans pour autant qu’on puisse parler de ras de marée.
Cela commencera à changer vers 1958 après la sortie de Bons baisers de Russie. Des critiques qui se feront plus pesantes après Dr No et Goldfinger au point d’affecter le travail du romancier qui traversait également des problèmes conjugaux. C’est également en 1958 que Fleming travaillera sur l’écriture d’un scénario avec Kevin McLory et Jack Whittigham. Scénario qui finira publié sous forme de roman en 1961 sous le titre Opération tonerre et qui allait causer bien des soucis aux futurs producteur de la franchise mais on vous en parlera dans un prochain épisode.
Ian Fleming a en tout cas rapidement été attiré par le cinéma et si Opération tonerre devra attendre 1965 pour être porté à l’écran par Albert Broccolli et Harry Saltzman avec Sean Connery en vedette, la première apparition de James Bond en chair et en os date de 1954. C’était alors une adaptation sous forme de série live de Casino Royale diffusé sur la chaine américaine CBS. Le programme mettait en scène un agent non pas anglais mais américain du nom de Jimmy Bond interprêté par Barry Nelson. Le résultat final est plus qu’oubliable.
C’est en 1961 que le déclic final aura lieu. Le 17 mars très exactement quand le magazine Life publie la liste des livres préférés du Président Kennedy parmis lesquels figure Bons baisers de Russie. De quoi éveiller ou réveiller l’intérêt du monde du cinéma pour l’agent 007 C’est ainsi que Dr No sort en Grande-Bretagne le cinq octobre 1962.
Un succès dont Fleming ne profitera que peu puisqu’il décèdera le 12 août 1964 d’une crise cardiaque sans nul doute provoquée par sa consommation excessive de cigarettes, on parle de 60 par jour, ainsi que son penchant pour l’alcool. Les deux derniers romans de son espion seront publiés après sa mort en 65 et 66. De même pour son roman pour enfant ‘Chitty chitty bang bang’ écrit pour son fils, qui sortira en octobre 1964 et sera porté à l’écran par Broccolli en 1968.
Si James Bond continue de cartonner au box-office mondial 60 ans après sa première apparition dans Dr No, sa version de papier n’est pas délaissée pour autant puisque 29 romans ont vu le jour depuis le décès de Fleming. Tous rédigés par des écrivains britanniques sous la supervision de la famille du romancier. Le dernier en date est d’ailleurs paru quelques jours avant le couronnement de Charles trois avec un titre évocateur… On his Majesty’s secret service.
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